The intoxicating Anne Legaré

Robert Comeau and the assassination of Mario Bachand – a matter of deception

Des doutes sur deux étudiants québécois


Dans son récit, McLoughlin sème le doute quant à une possible
complicité, dans l’assassinat, de deux étudiants universitaires
québécois, Anne Legaré et François Dorlot, qui se trouvaient
alors à Paris. McLoughlin dit d’Anne Legaré qu’elle connaissait bien Bachand et lui rendait souvent visite à l’appartement de Barral, où elle l’aidait dans la préparation d’un livre qui a finalement été publié par les amis de Bachand après sa mort sous le titre Trois textes11. Anne Legaré, qui est devenue par la suite politologue à l’UQAM et a exercé la fonction de déléguée du Québec à New York et à Washington dans les années 1990, a catégoriquement démenti cette affirmation tout comme elle a nié avoir jamais visité l’appartement de Pierre Barral. Elle a aussi nié avoir téléphoné à François Dorlot deux jours avant l’assassinat de Bachand pour lui demander son adresse, contrairement à ce que prétend McLoughlin dans son récit. Elle l’a écrit dans un manuscrit non publié
qu’elle m’a confié après le colloque organisé en 2010 pour le quarantième anniversaire des événements d’Octobre, et l’a réaffirmé dans un courriel qu’elle m’a adressé en juin 2018:

Statement of Anne Legaré

obtenir ses coordonnées, quelque temps avant l’assassinat, tel que rapporté [par McLoughlin]. Donc, d’un côté, selon lui, j’allais chez Bachand pour l’aider à travailler sur ses textes et en même temps, j’appelais Dorlot pour obtenir son adresse, car je ne savais pas où il habitait!

The intoxicating Anne Legaré
46, rue Eugène-Lumeau, apartment where Mario Bachand was murdered lower right

Les citations sont tirées de l’épreuve de cuisine d’une publication récente de Robert Comeau, un historien universitaire québécois qui a joué un bref rôle dans la crise d’octobre. Il mentionne deux personnes qui jouent un rôle obscur mais fascinant dans l’histoire de l’assassinat de Mario Bachand, Anne Legaré et François Dorlot. Deux personnes dont le comportement illustre le rôle de la tromperie dans les tentatives de dissimulation de la vérité.

Renseignements au 46, rue Eugène Lumeau

Lors de ma première visite au 46, rue Eugène-Lumeau, en compagnie d’une Française, avec appareil photo, que j’avais rencontrée à Montréal, dans le banlieu St-Ouen du nord de Paris, j’ai eu la chance de rencontrer Monsieur Seffino-Tréco, qui habitait avec son épouse l’appartement du rez-de-chaussée, juste en dessous de celui qui avait été occupé par Pierre Barral et son colocataire pendant un certain temps, François Mario Bachand.

Je suis arrivé du centre de Paris sur la ligne 13, en descendant à la station Garibaldi. J’ai ensuite descendu l’avenue Kléber et j’ai tourné à gauche dans la rue Eugène-Lumeau, et j’ai continué sur la courte distance jusqu’à l’entrée du numéro 46. Une barrière en fer forgé, solidement verrouillée, bloquait le passage. J’ai sonné.

Entrance to 46, rue Eugène-Lumeau
Entrance to 46, rue Eugène-Lumeau

Monsieur Seffano -Tréco

Un homme plus âgé, d’une soixantaine ou d’une soixante-dixième année, est apparu. Autour de son cou, une lanière portait un petit bouclier émaillé bleu, rouge et blanc avec le drapeau de la France. Je l’ai regardé. Il a dit qu’il avait été dans la Résistance pendant la guerre, un groupe comme lui dans les gares de St Ouen. Un groupe communiste. Une nuit, à minuit, on a frappé à la porte.

Deux hommes du Renseignement général, la police politique française, désormais à la solde des Allemands, le poussent dans une voiture et l’emmènent à Fresnes, la prison où sont détenus de nombreux Résistants arrêtés. Là, il a été interrogé et emmené à Fresnes pour y être interrogé. Quelques jours plus tard, il a été traduit devant un tribunal et condamné à mort. Mais juste après le 6 juin, le débarquement de Normandie était en cours, et il fut envoyé à Rennes, la capitale de la Bretagne, où se trouvait le quartier général de la Gestapo, pour y être interrogé plus avant.

Je lui ai expliqué le but de ma visite. Il y avait eu un meurtre dans le bâtiment en 1971. La victime était un homme du Canada, de Montréal, et j’étais en train d’écrire à ce sujet. Était-il au courant ? Oui, il le savait.

Sa femme est née dans l’immeuble. Ils y vivaient depuis leur mariage, en 1938. Pourrais-je visiter l’appartement où le meurtre a eu lieu ? Il ne pouvait pas me laisser entrer, a-t-il dit ; peut-être que l’occupant le ferait, a-t-il dit, mais il n’est pas là maintenant. À ce moment-là, un homme est apparu, il a remonté Eugène-Lumeau dans la direction d’où nous étions venus.

Le lieu du crime

Steve” s’est avéré être un Palestinien, professeur d’anglais, avec une facilité et un sens de l’humour ironique communs aux Palestiniens. Je lui ai parlé du meurtre commis vingt-cinq ans auparavant, un meurtre commis dans la chambre que vous occupez maintenant. Un homme avait été abattu par un jeune homme et une jeune femme, lui ai-je dit. Ils ont dit qu’il avait été tué par des terroristes, mais j’avais quelques doutes. Peut-être, cependant, avait-il été tué par des personnes qui prétendaient être des terroristes mais qui en réalité appartenaient à un service spécial. “Je sais ce que vous voulez dire”, a-t-il dit, avec un sourire triste”. Il m’a conduit le long de la promenade qui longeait la façade du bâtiment. C’était le printemps, et les pétunias bleus le long du bord donnaient un air de paix, comme s’il ne s’agissait pas du tout d’un meurtre.

Au bout du bâtiment, nous avons tourné à droite vers les escaliers. Il y avait un plus petit bâtiment sur notre gauche qui, selon Steve, était le sous-sol du bâtiment principal. Je suis entré et j’ai trouvé un intérieur sombre avec un sol en terre battue, une odeur de terre humide, qui avait deux ouvertures au niveau du sol, des trous de ventilation qui diffusaient une faible lumière. J’ai eu l’impression que cette pièce avait quelque chose à voir avec le meurtre de Mario Bachand.

The intoxicating Anne Legaré
Stairs at 46, rue Eugène-Lumeau, St Ouen, Paris

Steve m’a fait monter les escaliers jusqu’au prochain étage, la porte juste devant.

La zone de tuerie

Une simple pièce, en face de l’entrée, une simple douche en tôle, blanche. Puis une cuisine simple, une cuisinière à quatre feux, un petit réfrigérateur, un rideau sur une ficelle. Puis un lit, par une fenêtre donnant sur la rue Eugène-Lumeau. Plus loin, deux fenêtres donnant sur la promenade de devant, petite cour devant une clôture de deux mètres de haut.

La balle dans le plafond

J’ai regardé le plafond, au-dessus de l’entrée de la cuisine. J’ai dit à Steve qu’une balle avait été trouvée là, enterrée dans le plâtre. Les enquêteurs de la Brigade criminelle ont conclu qu’une balle avait frappé Bachand au front, avait dévié et avait frappé le plafond. Pierre Barral, l’ami de Bachand qui avait découvert le corps, l’a remarqué le jour suivant. En sondant le trou, la balle de plomb, très déformée, est tombée et s’est écrasée sur le sol. Barral l’emmène au 36, Quai des Orfèvres et la donne aux enquêteurs.

Steve m’a tendu un couteau et m’a dit de creuser dans l’endroit du plafond. J’ai alors trouvé du plâtre mou, manifestement celui que Pierre Barral avait utilisé pour remplir le trou. Le trou lui-même était assez grand, deux ou trois centimètres ; la balle avait été très déformée lorsqu’elle avait frappé l’os du front de Bachand.

Dernier dîner pour Mario Bachand

J’avais interrogé Pierre Barral par téléphone et je prenais bientôt le train pour Limoges, où il était désormais professeur de mathématiques à l’université de Limoges, résidant avec Françoise Laville, aujourd’hui sa femme, et leurs deux enfants. Au moment du meurtre, Françoise et lui, étudiants à l’université de Saint-Ouen, avaient passé deux heures à déjeuner avec Bachand et le mystérieux couple. Bachand au bout de la table, le dos tourné aux fenêtres donnant sur la promenade qui longe l’avant du bâtiment ; des deux mystérieux visiteurs, l’homme à la droite de Bachand, la femme, blonde, au regard perçant de ses yeux bleus, au bout, faisant face à Bachand. L’homme à la droite de Bachand, derrière lui le lit et les deux fenêtres donnant sur la rue Eugène-Lumeau. Pierre Barral, et Françoise Laville à gauche, face à l’homme.

Pierre Barral retrouve le corps de Mario Bachand

Ils ont déjeuné avec un cous-cous que Pierre avait préparé, d’après une recette algérienne à base de palourdes. Les deux visiteurs ont peu parlé et n’ont presque rien mangé. Après qu’ils se soient assis à table, l’homme, qui était assis sur le long côté, a posé sa veste sur le lit derrière lui.

L’objet lourd dans la poche de la veste

Vous êtes un professionnel ?

Bachand avait été touché par trois balles. La première a dévié sur son front puis a frappé le plafond, à 30 cm de l’entrée de la cuisine. Le traumatisme lui a fait vomir son cous-cous sur la table devant lui. La seconde a frappé le côté droit de sa tête, pénétrant dans le cerveau, alors qu’il tentait de se lever et de s’échapper. Il est tombé au sol, atterrissant sur le ventre. Un jet de sang de la taille d’un crayon a coulé du côté droit de sa tête et a commencé à s’accumuler. L’homme assis à droite, l’homme au pistolet, se leva, s’approcha de lui, pointa le pistolet au centre supérieur du crâne, et tira la troisième balle dans le cerveau de Bachand.

Ce que le KGB appelle le “tir de contrôle”, pour s’assurer que tout est sous contrôle.

C’était le cas.

Ils sont partis précipitamment, laissant la porte entrouverte.

Il ne fait aucun doute que les tueurs étaient des professionnels bien entraînés, ce dont les enquêteurs de la Brigade criminelle ont immédiatement eu connaissance. Mais qui étaient-ils ? Qui, dans l’entourage de Mario Bachand, les avait aidés ? Plus important encore, qui avait ordonné le meurtre ?

Je me réjouissais de me rendre à Limoges, pour apprendre ce que je pouvais de Pierre et Françoise Barral afin d’aider à trouver les réponses à ces questions et à d’autres

Le sang simple, ou, chaque crime laisse quelque chose derrière lui

J’ai dit à Steve où, d’après ce que Pierre Barral m’avait dit lors de notre conversation téléphonique, se trouvait la table où Bachand avait pris son dernier repas, et où il était tombé, dans la collecte de sang. Steve m’a dit de couper dans le revêtement de sol en feutre vert, une sous-couche servant de tapis, fermement collée au sol, pour voir si je pouvais trouver des preuves. Il m’a tendu un couteau à lame tranchante et m’a dit que je devais le faire. Je l’ai fait et j’ai immédiatement trouvé une tache ronde, d’environ 10 centimètres de diamètre, d’environ deux ou trois millimètres d’épaisseur, rouge foncé, ferme mais caoutchouteuse au toucher. La couleur et la texture du sang séché. J’ai découpé un petit morceau du revêtement de sol auquel une partie du matériau s’était fixé, et je l’ai placé dans une enveloppe que j’avais par hasard.

On a frappé à la porte. Quatre locataires avaient pris connaissance de mes demandes et étaient curieux. L’un d’eux vivait dans l’immeuble à l’époque et nous a dit ce qu’il savait. Une discussion est devenue une autopsie de meurtre.

Une rencontre une autopsie de meurtre

Peu de temps après le meurtre, les locataires en difficulté se sont rencontrés. M. Seffano -Tréco leur a dit qu’avant l’événement, il avait entendu des voix venant du sous-sol, par les trous de ventilation. Un sous-sol qui n’a jamais été visité ou utilisé, et des voix inconnues. Ils ont également parlé de la jeune femme qui rendait visite à Mario Bachand de temps en temps pour l’aider à écrire un livre, une jolie petite fille aux cheveux bruns foncés, une étudiante à la Sorbonne, une Québécoise. Son nom, que j’ai vérifié par la suite en l’interviewant, elle et d’autres, dont Pierre Barral ? Anne Legaré.

Le sang simple, ou, chaque crime laisse quelque chose derrière lui

J’ai dit à Steve où, d’après ce que Pierre Barral m’avait dit lors de notre conversation téléphonique, se trouvait la table où Bachand avait pris son dernier repas, et où il était tombé, dans la collecte de sang. Steve m’a dit de couper dans le revêtement de sol en feutre vert, une sous-couche servant de tapis, fermement collée au sol, pour voir si je pouvais trouver des preuves. Il m’a tendu un couteau à lame tranchante et m’a dit que je devais le faire. Je l’ai fait et j’ai immédiatement trouvé une tache ronde, d’environ 10 centimètres de diamètre, d’environ deux ou trois millimètres d’épaisseur, rouge foncé, ferme mais caoutchouteuse au toucher. La couleur et la texture du sang séché. J’ai découpé un petit morceau du revêtement de sol auquel une partie du matériau s’était fixé, et je l’ai placé dans une enveloppe que j’avais par hasard.

On a frappé à la porte. Quatre locataires avaient pris connaissance de mes demandes et étaient curieux. L’un d’eux vivait dans l’immeuble à l’époque et nous a dit ce qu’il savait. Une discussion est devenue une autopsie de meurtre.

Une rencontre une autopsie de meurtre

Peu de temps après le meurtre, les locataires en difficulté se sont rencontrés. M. Seffano -Tréco leur a dit qu’avant l’événement, il avait entendu des voix venant du sous-sol, par les trous de ventilation. Un sous-sol qui n’a jamais été visité ou utilisé, et des voix inconnues. Ils ont également parlé de la jeune femme qui rendait visite à Mario Bachand de temps en temps pour l’aider à écrire un livre, une jolie petite fille aux cheveux bruns foncés, une étudiante à la Sorbonne, une Québécoise. Son nom, que j’ai vérifié par la suite en l’interviewant, elle et d’autres, dont Pierre Barral ? Anne Legaré.

Anne Legaré

Je l’ai appelée peu de temps après avoir commencé mes recherches sur le meurtre de Bachand, principalement pour lui poser des questions sur l’appel téléphonique que François Dorlot prétendait lui avoir passé, le matin où il a emmené la sœur de Bachand pour un voyage de trois ou quatre jours en dehors de Paris, au cours duquel Mario a été assassiné. Le moment me semblait un peu opportun et je voulais m’enquérir de la déclaration de Dorlot.

Dactylographe avec un doctorat

Elle ne voulait pas me rencontrer, a-t-elle dit, à moins que Dorlot ne soit présent. J’ai trouvé ce refus amusant, car elle savait bien que Dorlot refusait catégoriquement d’être interrogé sur ses activités, assez particulières, liées au FLQ, qui ont commencé peu de temps après la création du FLQ. Des associations avec, à mon avis, au moins trois personnes qui ont fini par mourir, dont Mario Bachand. J’ai également demandé à lui parler de son aide à Bachand pour la rédaction des textes publiés après sa mort sous le nom de “Trois Textes”. Elle m’a dit qu’elle ne faisait que taper lorsqu’elle s’est rendue au 46, rue Eugène-Lumeau, se distançant de toute notion d’association avec l’écriture, le texte, les idées, la pensée exprimés dans “Trois Textes”.

Après la publication de mon “Dernier arrêt, Paris : l’assassinat de Mario Bachand et la mort du FLQ”, en 1998, j’ai appelé Legaré. Je voulais connaître sa réaction, et tout commentaire informatif sur l’affaire Bachand. Le seul commentaire que j’ai reçu était “Je n’étais pas l’ami de Mario Bachand”, sur un ton hostile qui disait clairement qu’elle ne parlerait pas de l’assassinat de Bachand

Dans “Last Stop, Paris”, je la désigne comme “l’amie” de Bachand, ce qui me semblait approprié, sans savoir le contraire, étant donné qu’elle avait refusé un entretien avec moi. L’interview d’Anne Legaré que j’avais demandée aurait pu révéler ce qui se passait, avec l’écriture, lorsqu’elle rendait visite à Mario Bachand au 46, rue Eugène-Lumeau, dans l’appartement d’une pièce dans lequel, selon les témoignages, peu de temps après une telle visite, un jeune couple arrivait de Montréal et, au cours d’un repas de bienvenue, prenait la peine de tirer trois balles à la tête, la dernière, alors qu’il gisait dans ce qui allait bientôt devenir une mare de sang, au centre supérieur du crâne, pour s’assurer que sa vie était finie.

Je l’ai appelée peu de temps après avoir commencé mes recherches sur le meurtre de Bachand, principalement pour lui poser des questions sur l’appel téléphonique que François Dorlot prétendait lui avoir passé, le matin où il a emmené la sœur de Bachand pour un voyage de trois ou quatre jours en dehors de Paris, au cours duquel Mario a été assassiné. Le moment me semblait un peu opportun et je voulais m’enquérir de la déclaration de Dorlot.

Dactylographe avec un doctorat

Elle ne voulait pas me rencontrer, a-t-elle dit, à moins que Dorlot ne soit présent. J’ai trouvé ce refus amusant, car elle savait bien que Dorlot refusait catégoriquement d’être interrogé sur ses activités, assez particulières, liées au FLQ, qui ont commencé peu de temps après la création du FLQ. Des associations avec, à mon avis, au moins trois personnes qui ont fini par mourir, dont Mario Bachand. J’ai également demandé à lui parler de son aide à Bachand pour la rédaction des textes publiés après sa mort sous le nom de “Trois Textes”. Elle m’a dit qu’elle ne faisait que taper lorsqu’elle s’est rendue au 46, rue Eugène-Lumeau, se distançant de toute notion d’association avec l’écriture, le texte, les idées, la pensée exprimés dans “Trois Textes”.

Après la publication de mon “Dernier arrêt, Paris : l’assassinat de Mario Bachand et la mort du FLQ”, en 1998, j’ai appelé Legaré. Je voulais connaître sa réaction, et tout commentaire informatif sur l’affaire Bachand. Le seul commentaire que j’ai reçu était “Je n’étais pas l’ami de Mario Bachand”, sur un ton hostile qui disait clairement qu’elle ne parlerait pas de l’assassinat de Bachand

Dans “Last Stop, Paris”, je la désigne comme “l’amie” de Bachand, ce qui me semblait approprié, sans savoir le contraire, étant donné qu’elle avait refusé un entretien avec moi. L’interview d’Anne Legaré que j’avais demandée aurait pu révéler ce qui se passait, avec l’écriture, lorsqu’elle rendait visite à Mario Bachand au 46, rue Eugène-Lumeau, dans l’appartement d’une pièce dans lequel, selon les témoignages, peu de temps après une telle visite, un jeune couple arrivait de Montréal et, au cours d’un repas de bienvenue, prenait la peine de tirer trois balles à la tête, la dernière, alors qu’il gisait dans ce qui allait bientôt devenir une mare de sang, au centre supérieur du crâne, pour s’assurer que sa vie était finie.

L’objectif de l’animation, on l’admet, est la participation de la population aux décisions qui la concernant. Si on regarde la société dans laquelle on vi, il apparaît qu’une minorité de personnes détient les pouvoirs de décision et que le reste de la population subit ces décisions. Et c’est pourquoi l’animation, en poursuivant son objectif de participation, rejoint le politique. L’objectif de l’animation est donc la participation politique. (…)

Information sur le Projet Centre-Est presentée aux volontaires de La Compagne des Jeunes Canadiens au Quebec, CJC-Quebec, vol. 1, no. 13, 15.3.68, RG 116, vol. 112, file 509 operations.

Pas d’objectifs indignes, simplement une simple vérité fondamentale de la démocratie. Bien sûr, Mario Bachand interpréterait plutôt “l’animation sociale” comme une “recette d’action révolutionnaire”, l’action révolutionnaire comme la violence ouvrière, le désordre, la subversion, le terrorisme, dont aucun n’a jamais eu de rapport avec Anne Legaré. Aucun d’entre eux, comme le montre sa vie personnelle et professionnelle exemplaire, et comme le prouve son curriculum vitae, n’a suscité l’intérêt ou la sympathie d’Anne Legaré. Cependant, pourquoi voudrait-elle dissimuler ses visites au 46, rue Eugène-Lumeau et son aide à Mario Bachand dans la rédaction de Trois Textes ? Que faisait-elle exactement lors de ses visites, et dans quel but ?

Quant à Robert Comeau, pourquoi devrait-il prendre la défense d’Anne Legaré, impossible à réaliser au vu des preuves ? À mon avis, je considère Legaré et Comeau comme ce que les Allemands de l’Est, citoyens de la RDA (République démocratique allemande), appelaient les “faisans dorés”, se faisant la belle en se soutenant mutuellement pour bénéficier des avantages offerts par l’État dans le domaine universitaire, de la participation occasionnelle à une étude ou une enquête, ou d’un bureau. Pour qui l’association avec Mario Bachand, et son assassinat, seraient gênants.

Des questions troublantes subsistent

D’après les preuves, les tueurs de Bachand étaient des professionnels bien formés, dans le cadre d’une opération bien planifiée, dotée de ressources, organisée et dirigée, dans le plus grand secret. Couvert par une fausse histoire dans les médias ; protection contre la police inquisitrice. Seuls les gouvernements, et leurs services spéciaux, peuvent faire ces choses. Ce qui soulève des questions troublantes.

Qui étaient les tueurs, le jeune couple de Montréal qui s’est présenté au 46, rue Eugène-Lumeau avec un pistolet de calibre .22 ? Quel gouvernement, et quel service, était dans l’ombre, derrière eux ? La France était-elle impliquée ? Qui, dans l’entourage de Mario Bachand, les avait aidés ? Quelqu’un d’autre est-il mort ? Pourquoi les journalistes canadiens à Paris, avec l’ardeur de la jeunesse, ne se sont-ils pas précipités sur place pour poser quelques questions ? Plus important, qui avait ordonné le meurtre, car il avait certainement été ordonné, et pourquoi ?